Le bikepacking, ma nouvelle passion !

Chère Lectrice, cher Lecteur,

Si vous me lisez depuis quelques temps, vous savez que je vis une vie assez ordinaire : j’ai un appart’ dans une petite ville suisse, j’ai deux enfants et je suis cadre dans un bureau d’ingénieur. 

Au-delà de ce quotidien, je trouve un espace de liberté et d’aventure dans la nature et les montagnes environnants mon domicile : trail, rando, bivouac, bushcraft avec les enfants…

Quel rapport avec le vélo ? 

Voyons cela ensemble ! 

Attention ! Cette chronique contient de nombreuses photos de vélos, et un vocabulaire spécifique au cyclisme !

Quatre éléments de départ

Le vélo au quotidien

Tout d’abord, il y a ma pratique du vélo, qui jusqu’à récemment se résumait à faire les 1’000m séparant mon domicile de la gare matin et soir. Je roulais sur un vieux vélo cadre course entièrement révisé par mes soins, dont j’avais remplacé le guidon d’origine par un guidon « time-trial » et les roues « boyau » en 700c par des roues bien plus larges (et confortables !) en 650B.

J’aime depuis toujours bricoler sur mes vélos…comme pour la couture et le MYOG, c’est un domaine où j’adore expérimenter, et n’ai pas d’inhibition à modifier et combiner des composants pour personnaliser mon vélo.

velo vintage de course
Mon « vintage » remanié

Je possède aussi un vélo électrique (un « speedbike » atteignant une vitesse de 45 km/h), que j’utilise pendant l’été pour parcourir la trentaine de km jusqu’au bureau. 

Dans les deux cas, donc, une vision purement utilitaire du vélo : aller du point A au point B le plus rapidement possible.

 

L’influence de la rando-bivouac et du packraft

Ensuite, entre en jeu ma passion croissante pour la randonnée et le bivouac, avec d’une part l’envie d’aller plus loin et plus longtemps pour poser ma tente dans des endroits intéressants, et d’autre part l’influence de la MUL, la marche ultra-légère et son matériel plus compact et plus léger. Je vous en ai déjà parlé quelques fois, et vous ai présenté une partie du matériel que j’utilise avec les avantages et les inconvénients de celui-ci.

Je vous en ai parlé dans mes chroniques relatant ma micro-expédition en Allemagne avec mon packraft : j’utilise et je maîtrise maintenant un kit complet de matériel (couchage et gestion de la nourriture) avec un poids de base d’environ 9kg, auxquels je dois rajouter le poids de l’eau et la nourriture pour le nombre de jour souhaité

 

La découverte du bikepacking

Arrive finalement ma découverte sur internet du « bikepacking », via mes lectures et la consultation de site web liés au packraft. 

En lisant des récits d’aventure, plus ou moins longues, de personnes partant sur des chemins de traverse avec des VTT ou des vélos gravel équipés de quelques sacoches minimalistes derrière leur selle, dans leur cadre et à leur guidon, je me suis rendu compte que j’avais déjà tout le matériel et les connaissances qu’il fallait pour faire la même chose…sauf le vélo !

J’ai rapidement dû me rendre à l’évidence que mon vélo vintage n’était absolument pas adapté à la pratique du bikepacking (du moins pas en dehors des routes goudronnées, même avec des pneus en 650B) : freins à mâchoires et non à disques, cadre pas adapté à y attacher des sacoches ou des supports, pneus pas assez larges pour garantir un bon confort sur des chemins caillouteux.

Inspiré par ces récits, je me suis alors mis en quête d’un nouveau vélo qui me permettrait d’aller plus loin et plus vite avec mon matériel de bivouac solidement fixé sur mon cadre.

 

Le MYOG

Reste encore un dernier élément dans la formule : le MYOG. Je vous en ai déjà souvent parlé ici, et vous connaissez mon intérêt pour la fabrication d’articles techniques à la maison. 

Le principe du bikepacking étant de transporter ses affaires dans des sacoches ou des harnais fixés sur le vélo, je me suis vite mis en tête, après avoir bien étudié le matériel à disposition sur le marché, que je pourrais me fabriquer une bonne partie des éléments nécessaires au transport des bagages.

Bikepacking vs cyclotourisme

Qu’est-ce qui distingue le bikepacking du cyclotourisme ? Voici un petit comparatif sur différents thèmes. Je force un peu le trait pour bien mettre en avant les nuances, et il existe évidemment des zones grises entre ces deux catégories !

Les vélos

Pour le cyclotourisme « traditionnel », on trouvera généralement un cadre de vélo « randonneur » avec une barre supérieure horizontale et un guidon droit. On peut parfois trouver des guidons « exotiques », avec des formes particulières. 

Le bikepacking fait appel à une plus grande diversité de format de cadre, puisqu’il peut aussi bien s’agir d’un VTT tout suspendu, d’un semi-suspendu avec un cadre « montagne » (barre supérieure inclinée), ou d’un gravel (cadre course plus classique). Pareil pour le guidon, on y trouvera aussi bien du guidon droit de VTT (flat-bar) que des cintres « route » (drop-bars) généralement plus larges (wide) et plus évasés (flared) que sur un vélo de route. On trouvera ici aussi des guidons spéciaux, comme la Jones H-bar, ou la Surly Corner Bar.

velo hybride VTT equipé travel
Hybride gravel/VTT équipé pour la course du Tour Divide – source www.bikepacking.com

Les sacoches

Le cyclotouriste utilisera généralement des sacoches larges et rigides accrochées de part et d’autre des roues avant et arrière, avec une charge également disposée sur le porte-bagage, et éventuellement une sacoche au guidon. Cette combinaison de 4 sacoches avant/arrière permet de transporter un gros volume de bagage, au prix d’un aérodynamisme moins bon.

velo cyclotourisme
Cyclotourisme « traditionnel » - source le-plaisir-a-velo.com

Le bikepacker privilégiera des sacoches plus petites et plus profilées : un sac de selle, accroché à la tige et éventuellement supporté par deux pattes reliées à l’axe de la roue arrière, une sacoche de cadre et une au guidon, et parfois deux petites sacoches sur les pattes de la fourche à l’avant. Le volume de tout cela étant nécessairement limité, ces sacs seront complétés par des petites poches fixées au guidon ou sur le cadre. La perte de volume de stockage comparée aux grosses sacoches latérales se fait au gain d’un profil aérodynamique beaucoup plus avantageux, et permet aussi de s’aventurer sur des singletracks bordés de buissons sans passer son temps à accrocher les branches.

Les roues et les pneus

Pour cette catégorie, il est nécessaire de comprendre que le bikepacking couvre une variété de chemins bien plus grande que le cyclotourisme traditionnel, qui est généralement cantonné aux routes goudronnées et en gravier. Je citerai deux exemples, chacun à un extrême de la gamme du bikepacking.

D’un côté, un vélo gravel avec des pneus fins, à peine plus gros que des pneus courses en 700c, qui permettra de faire des sorties sur le même terrain que le cyclotouriste classique, mais avec une prise au vent plus faible et une efficacité plus grande. C’est le genre de vélo utilisés dans les grandes courses d’aventure comme la Tour Divide (4’418km) en Amérique du Nord ou la Silk Road Moutain Race (1’899km) en Asie Centrale.

De l’autre côté le fatbike, qui avec ses pneus de près de 10cm de large, permet de rouler sur tous les types de terrain (neige, sable, boue…) en se passant totalement de chemin. C’est avec ce type de monture que de valeureux cyclistes sillonnent l’Alaska en hiver ou longe ses côtes sablonneuses.

fatbike sable
Fatbike dans le sable – source www.bikepacking.com

Les itinéraires possibles

Comme mentionné ci-dessus, les vélos utilisés pour le bikepacking, permettront d’aborder une gamme d’itinéraire bien plus large. Les vélos gravel seront quasiment aussi performants sur route goudronnée que sur des chemins en gravillon. Les cadres VTT, partiellement ou totalement suspendus, permettront d’explorer pratiquement tous les singletracks, et les fatbike se passeront même de chemins.

Et si c’est trop raide ou techniquement trop difficile, il reste le hike-a-bike : marcher en poussant son vélo !

Hike a bike
Hike-a-bike en Ecosse – source www.bikepacking.com

La synthèse de tous ces éléments

La synthèse de ces quatre éléments m’a donc conduit à me procurer un nouveau vélo et à fabriquer une série de sacoches et de harnais pour transporter mon matériel.

 

Le vélo

Au moment où je me suis procuré mon nouveau vélo, le marché mondial de la bicyclette subissait encore les contrecoups du COVID et de la disruption des chaines d’approvisionnement depuis l’Asie et l’Amérique du Nord. Le choix en Suisse était très limité, mais j’ai pu mettre la main chez un vélociste spécialisé dans le voyage à vélo près de chez moi. 

velo genesis
Le Genesis Vagabond « brut », avant que je ne commence à modifier ses composants

Le Genesis Vagabond est donc un hybride entre un gravel (guidon drop-bar, freins et leviers course SRAM Apex) et un VTT (barre supérieure du cadre inclinée, pneus en 29″ x 2.1, jeu de vitesse 1 x 11). Le fabricant utilise le terme monstercros. Il vient pré-équipé d’embossages taraudés à plein d’endroit sur le cadre pour y fixer des accessoires. Le vélo complet avant accessoires pèse environ 12kg.

J’ai opté pour un vélo avec cette géométrie et ce type de pneus, car je savais pertinemment que je n’arriverais pas à me cantonner aux routes goudronnées et gravillonnées, et que j’irais tôt ou tard me perdre sur un singletrack ou un chemin pédestre. 

Et cela n’a pas manqué : dès mes premières sorties avec ce vélo, je me suis retrouvé à passer sur des chemins que j’emprunte parfois en trail. J’ai pu constater que je n’avais absolument pas le niveau technique pour assurer sur des chemins comme ça, et que le guidon « route », même large, n’était pas très adapté aux descentes techniques. On appelle apparemment ça de l’underbiking !

 

Les modifications

Je me suis rapidement mis à commander des composants plus spécifiques, et j’ai apporté quelques modifications au Vagabond.

  • Remplacement du guidon Genesis d’origine (420mm) par un guidon PNW Components plus large (480mm)
  • Remplacement des pneus Kenda d’origine en 29 x 2.1 par des pneus plus roulants et plus gros Renee Herse Fleecer Ridge en 29 x 2.2
  • Remplacement de la cassette SRAM 11vitesses 11-42 par une cassette Sunrace 11-46 et du plateau 36 dents par une « araignée » Wolf Tooth CAMO et un plateau 32 dents

Cette dernière modification me permet de faire descendre le développement à 1.6m (ratio de 0.696), voire même à 1.4m (ratio de 0.609) si je mets un plateau 28 dents. Le développement est la distance parcourue en faisant un tour de pédalier, et le ratio est le nombre de dents du pignon (arrière) divisée par le nombre de dents du plateau (avant). Plus cette valeur est basse, plus la puissance musculaire est démultipliée à la montée. Cette modification est essentielle pour me permettre de « mouliner » sans trop d’effort à la montée avec le vélo chargé. Et comme j’habite au pied des Alpes, les itinéraires que j’emprunte sont très souvent raides !

velo vagabond equipé
Mon Vagabond avec toutes les modifications que je lui ai fait subir : pneus plus gros, guidon plus large, changement du plateau et de la cassette, et montage de plein de sacoches MYOG-made

Les sacoches

Pour transporter tous mes bagages, j’ai commandé de l’Ecopak, un tissu laminé ultraléger et très résistant, et j’ai fabriqué :

  • une sacoche de cadre
  • une petite sacoche à fixer au-dessus de la barre supérieure du cadre
  • deux pochettes à accrocher au guidon.
sacoche carde de velo DIY
Sacoche de cadre fait main en Ecopak

En outre, avec des plaques de polypropylène, j’ai conçu, pour transporter des sacs étanches :

  • un harnais de selle
  • un harnais de guidon.
Harnais de selle
Harnais de selle pouvant contenir un sac étanche, ici un sac Exped d’un volume de 19 litres

Les seules sacoches que j’ai acheté sont les deux sacoches Salsa Anything à accrocher sur les tiges de la fourche.

Volume total et capacité de transport

Au final, j’ai une contenance d’environ 20 litres derrière la selle, environ 15 litres au guidon, environ 5 litres dans le cadre, 2 x 3.5 litres sur la fourche et 5 litres de plus répartis dans les petites sacoches, soit un volume total d’environ 52 litres. C’est un peu moins que mon sac à dos d’expédition de 60 litres, mais déjà largement suffisant pour emmener mon kit de base. 

velo bickepacking equipé
Mon kit de base, réparti dans deux sacs étanches (habits, sac de couchage, tente), deux sacoches de fourches (popotte, affaire de toilettes, et les deux sacoches de cadre (nourriture, assiette, eau).

Le vélo entièrement chargé avec toutes mes affaires pour une nuit pèse 22kg. Mon kit de base pesant environ 9 kg et le vélo tout nu 12kg, j’ai donc 1kg de sacoches à vide. 

Si je devais partir plus longtemps, j’aurais quelques habits en plus, et évidemment plus de nourriture, et j’arriverais sans doute à un poids total d’environ 25kg.

Pour le transport de l’eau, j’ai deux portes-gourdes derrière ma selle (2 x 0.6 litres) et une poche à eau Apidura au format adapté à la sacoche de cadre (1.5 litres). Je peux donc transporter au maximum 2.7 litres sur le vélo.

bickepacking nature
Sur les chemins de l’aventure…

Pour en savoir plus

Si le sujet vous intéresse, voici deux sites de référence sur le bikepacking :

  • bikepacking.com : LA référence absolue au niveau mondial (en anglais, basé aux USA, mais de nombreuses contributions européennes ou françaises). Plus qu’un site web, c’est une communauté. S’y inscrire donne droit à la réception du Bikepacking Journal, et de nombreux rabais ou avantages chez des fournisseurs, et permet de faire vivre le site et leur excellente chaine Youtube.
  • francebikepacking.com : un site intéressant conçu par un français (vivant en Amérique du Nord), qui donne plein de références et d’inspirations. Il propose en outre à ceux qui s’inscrive un tableur excel permettant de tenir un inventaire du matériel transporté sur son vélo

 

Voilà pour cette introduction sur le sujet du bikepacking, et sur les adaptations que j’ai fait sur mon vélo pour le personnaliser.

Ce vélo et ce matériel représentent maintenant un vecteur de plus pour moi pour me « projeter » dans la nature.

Dans une prochaine chronique, je vous parle d’une petite sortie en bikepacking, une « one-nighter » que j’ai fait récemment.

 

Allez dehors, et essayez !

 

Sylvestre Grünwald

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *