Chère Lectrice, cher Lecteur,
La hache et sa petite sœur la hachette accompagnent l’humanité depuis des millénaires. Les premières haches remontent à plus de 1.6 millions d’années. Durant le Paléolithique, ces haches consistaient en des pierres taillées montées entre des branches de bois ligaturées avec de la corde. Au Néolithique, il y a 11’000 ans, la hache se fabrique en pierre polie, avec parfois des centaines d’heures de travail pour les façonner. L’Âge du cuivre, il y a environ 4’000 ans, voit l’apparition des premières haches métalliques. Leur solidité et leur résistance ira dès lors croissant jusqu’aux haches en acier que nous employons actuellement.
La hachette est, à mes yeux, un outil essentiel pour le buschraft, voire pour un kit de survie si son poids s’intègre dans votre concept.
Mais pour d’autres tâches, elle est moins pratique qu’un gros couteau ou moins puissante qu’une hache…que choisir ?
Je vous donne ici quelques notions générales et j’évoque le matériel que j’utilise. Je reviendrai dans une autre lettre sur les techniques à utiliser.
Quelques définitions !
Pour commencer, quelques définitions s’imposent. Attention, celles-ci n’engagent que moi, et les puristes y trouveront probablement à redire !
- Hache : longueur du manche de plus de 60cm, manche profilé. On n’évoquera aujourd’hui que la hache dans sa forme « classique », et l’on ne parlera pas des haches spécifiques au métier du charpentier, aux haches de guerre, de lancer, ou autre merlin.
- Hachette : longueur du manche de moins de 60 cm, manche profilé
- Tomahawk : longueur du manche de moins de 60cm, manche droit, tête en marteau ou en pioche à l’opposé de la lame
- Gros couteau : couteau qui, pour avoir une utilité quelconque dans les usages qui nous intéressent ici, doit avoir une lame d’au moins 15cm de long et d’au moins 3mm d’épaisseur.
Un outil, pour quel usage ?
Il existe plusieurs usages pour lesquels les outils définis ci-dessus sont en concurrence.
- Abattre un arbre
- Fendre du bois
- Planter des clous/sardines/pieux
- Travail fin sur le bois
Abattre un arbre
Au-delà de 15cm de diamètre de tronc, la hache est reine. Pas de discussions.
En-dessous de ce diamètre, la hachette et le tomahawk peuvent encore être efficaces, mais au-delà, ils n’ont simplement pas la puissance et la masse d’une hache. Vous attraperez des cloques et une tendinite avant d’avoir pu faire quoi que ce soit d’utile.
Quant au gros couteau, vous pourriez grâce au bâtonnage (voir définition), tenter d’abattre un arbuste avec, mais avec une efficacité douteuse. Garder ça pour les cas extrêmes.
Fendre du bois
Pour fendre des grosses bûches, on pense immédiatement à ça :
Mais au-delà du cliché barbe-bonnet-chemise à carreau, fendre du bois à la hache à votre domicile, sur un plot à fendre à la bonne hauteur, avec des bûches sciées proprement est une activité à risque…
Je n’ai pas vérifié les statistiques, mais c’est probablement l’usage de la hache qui cause le plus d’accidents…Vu l’énergie mise dans le mouvement, si la hache ripe de côté, il y a de fortes chances de se la planter dans le tibia avec des conséquences graves ! De même les buches peuvent parfois aussi voler sous l’impact, et finir dans vos jambes.
Faire la même action dans les bois est donc une autre paire de manche !
Considérez que :
- Vous devrez porter la hache avec vous
- Vous devrez trouver une surface plane, comme une souche, pour caler vos buches
- Vous devrez scier celles-ci proprement pour qu’elles soient bien droites
Donc à part dans le cadre de votre domicile, ou si vous décidez de construire une cabane en rondin au fond des bois, je ne privilégierais pas la hache.
Dans un contexte de bushcraft, la hachette vous permettra avec la bonne technique de fendre des bûches dans des rondins jusqu’à 15cm de diamètre (ce qui couvre la plupart des situations que vous rencontrerez dans ce contexte !). Elle a plusieurs avantages par rapport à la hache dans cette situation :
- Elle est bien plus facile à transporter
- Vous n’avez pas nécessairement besoin d’une surface plane (même si ça aide beaucoup)
- Les rondins n’ont pas nécessairement besoins d’être scié proprement
- Elle est moins dangereuse si correctement utilisée
Pour faire le même travail sur des rondins légèrement plus petits, le gros couteau est tout aussi efficace, grâce à la technique du bâtonnage. Son utilisation est même encore plus sûre que la hachette !
Le bâtonnage
Le bâtonnage est une technique permettant de fendre du bois facilement et de manière sûre avec un couteau (suffisamment solide) et un bâton (d’où le nom !).
Il s’agira de frapper sur le dos de la lame avec le bâton, pour l’enfoncer dans la bûche à fendre. On voit donc tout de suite la nécessité d’avoir une lame suffisamment épaisse.
Le bâtonnage peut aussi s’utiliser en tapant sur une hachette
Cette technique est tellement utile, que je vous en reparlerai dans une autre lettre !
Planter des clous, des sardines ou des pieux
Sur ce coup-là, c’est le tomahawk qui revient sur le devant de la scène, s’il est conçu avec un marteau à l’opposé de la hache. La face du marteau sera durcie, et adaptée à taper sur des objets métalliques, contrairement à la hache et à la hachette, dont l’arrière de la tête n’est généralement pas trempé (donc pas durci), et résiste mal aux impacts sur des objets durs.
Vous pouvez, bien évidemment, planter quelques clous ou enfoncer occasionnellement des sardines avec votre hache, mais à long terme, vous risquez de l’abimer.
Si vous utilisez une hachette, il faudra que celle-ci ait une tête assez large. La hachette ESEE que j’utilise couramment n’est ainsi pas très adaptée à cet usage, puisqu’elle est étroite.
Le gros couteau peut éventuellement servir à cet usage, mais sera peu adapté.
Travail fin du bois
Pour le travail fin du bois (p.ex faire un bâton de plume pour démarrer le feu), le couteau reste incontournable. La hachette, si la forme de sa tête et la géométrie de sa lame s’y prête, permettra avec l’habitude une certaine finesse.
Pour façonner une pointe sur un bâton, tous les outils évoqués aujourd’hui sont adéquats, avec plus ou moins de précision.
On trouvera généralement sur les gros couteaux une encoche dans la lame permettant de prendre en main le couteau plus près de la lame, donnant ainsi plus de précision. A l’inverse, on peut souvent aussi tenir la poignée assez vers l’arrière, pour avoir ainsi plus d’impact si on « frappe » avec la lame.
Prise en main du gros couteau, de gauche à droite : prise en avant, prise normale, prise en arrière
Tacticool vs practical
Un mot en passant sur le matériel « tacticool » (contraction de tactical et de cool, si vous n’aviez pas deviner…).
On trouver sur internet énormément de matériel « tactique », et beaucoup de débutants dans le monde de la survie ou du bushcraft semblent attirés par tout objet qui vous donnera un style badass.
J’ai toujours eu une certaine méfiance face à ce matériel. Dans le cas du tomahawk, on en trouve une multitude dans la gamme « tacticool », souvent vendus comme « l’ultime outil de survie » avec scie, pelle, décapsuleur et pince à épiler intégrés.
Soyez clairvoyant dans votre acquisition de matériel : ce n’est pas forcément parce que ça a l’air cool que ce sera pratique ! Et généralement, plus c’est simple, plus c’est solide !
Mon matériel
Depuis plus d’un an, j’utilise à chaque sortie dans les bois la combinaison suivante : scie pliante – hachette – couteau
La scie permet de débiter rapidement des tronçons de tronc ou de branches réguliers et propres, la hachette de les fendre grossièrement avec efficacité, et le couteau de finir le travail jusqu’à de très fines baguettes, de détacher des copeaux ou de faire des bâtons de plume.
Ma scie est en fait une scie d’élagage. Vous en trouverez à bon prix au rayon jardin de votre magasin de bricolage, ou sur des sites spécialisés. Je possède une Kershaw. La référence sur internet pour ce type de scie dans le milieu bushcraft semble être la Silky Gomboy, que je n’ai malheureusement jamais testé.
La hachette est une ESEE Gibson, en une seule pièce d’acier, avec une poignée en micarta texturée. Elle est compacte et légère, et a remplacé progressivement mon tomahawk dans mon kit.
Mon couteau d’usage fréquent est un ESEE PR4, du même acier et avec les mêmes poignées micarta que la hachette.
Pour ces deux outils, j’ai façonné moi-même un étui en kydex.
Comme pour tout matériel, l’essentiel n’est pas forcément le prix, mais surtout de savoir l’utiliser et d’en connaître les forces et les faiblesses !
Allez dehors et essayez !
Sylvestre Grünwald
2 réponses
Merci pour les infos. Je ne fais pas du camping sauvage mais j’ai à me débrouiller pour faire des feux régulièrement car j’ai un VR camper. Beaucoup de kayak! Merci encore
Merci pour ces conseils. J’aurai déjà appris à ne plus utiliser de massette (en acier) pour taper sur la tête de ma hachette quand je fends des bûches ! J’utiliserai désormais un gourdin en bois. Merci pour elle !