Expédition en packraft dans le Hunsrück – Jour 4

Chère Lectrice, cher Lecteur,

Voici la suite de mes aventures en Allemagne, où j’ai pris part à une mini-expédition guidée alternant randonnée et navigation en packraft.

Dans ma dernière chronique, j’ai relaté notre deuxième jour en expédition, où nous avons relié le château du Schmidtburg au château du Wartenstein, en pagayant une demi-journée, et en randonnant l’autre.

Je vous ai laissé en début de nuit, alors que je venais de me blottir dans mon abri, après avoir dégusté une excellente truite grillée au feu de bois.

Voyons maintenant la fin de cette expédition !

Réveil au soleil

J’ai passé la meilleure nuit depuis que nous sommes partis. Je m’installe progressivement dans une routine plus confortable dans mon abri, je trouve quelles positions me conviennent mieux dans les limites de mon sac de bivouac (dont je regrette l’achat, mais qui me protège quand même…), et surtout…je suis aidé par la fatigue !

 

Ce matin, dans le jardin du Schloss Wartenstein, le soleil est au rendez-vous ! C’est fort agréable de voir poindre ses premiers rayons par-dessus les collines, et nous profitons tous pour aérer notre matériel, et évacuer l’humidité et la condensation de la nuit.

Campement levé du soleil
Le soleil est au rendez-vous ce matin

La nuit n’a pas été bonne pour tout le monde malheureusement : nous retrouvons Kian, qui pour la troisième nuit consécutive, n’a pas dormi une seule minute.

Kian s’est vu offrir cette expédition en cadeau par sa femme, et ne pratique que très peu dans son quotidien la randonnée (et pas du tout le packraft). Il a donc dû s’équiper complétement en empruntant du matériel à des amis : sac à dos, tente…le seul objet qu’il possédait était son vieux sac de couchage datant de son adolescence. Ce sac de couchage trainait dans son grenier depuis une quinzaine d’année, dans son sac de compression. Autant le dire franchement : foutu ! Stockez toujours vos sacs de couchage dans un gros sac ouvert, ou en tissu respirant (type mesh), et sans comprimer le sac. Dans le cas de Kian, toute la garniture d’isolation (en duvet) a été écrasée et détruite par les années de compression. Résultat : Kian a crevé de froid pendant trois nuits, ce qui l’a totalement empêché de dormir. Le temps a dû être bien long pour lui…

Nous nous regroupons à nouveau autour de la place à feu, et mangeons nos petits-déjeuners côte à côte avec les autres participants. Pour moi, c’est de nouveau un porridge enrichi en fruits secs et noix. J’accompagne cela d’un de mes thés favoris, le lapsang souchong, un thé noir fumé. 

Voilà un « truc » que je vous encourage à retenir : emportez avec vous, lors de vos sorties ou expéditions, un bon thé que vous appréciez. La chaleur de la boisson vous réchauffera depuis dedans, et le goût familier vous apportera un peu de réconfort tout en vous encourageant à vous réhydrater correctement (plus qu’en buvant de l’eau). Si vous n’êtes pas du tout amateur de thé, mais plutôt accro au café, sachez que celui-ci peut avoir un effet diurétique (en clair : il vous fera pisser), ce qui n’est pas forcément opportun dans le contexte d’un effort sportif où vous voudriez rester hydraté…

Reprise de la marche

Après nous être restaurés et avoir plié le camp, nous repartons sur les chemins jusqu’à notre prochaine étape. Nous sillonnons à nouveau les flancs de la vallée, traversons quelques modestes villages, longeons des haies et des murets, et contournons quelques petits châteaux et maisons fortes.

Ruine de chateau colline
De nombreuses ruines de châteaux et de tours couronnent les collines environnantes

Le soleil est bien là, et la température devient confortable. Nous profitons des quelques pauses, ou des moments d’attente pour laisser le temps aux membres du groupe les moins rapides de rattraper la tête du cortège, pour ajuster les couches et les vêtements. Je fini la matinée en t-shirt !

Mon sac s’est allégé de quelque centaines de grammes depuis le début de l’expédition, vu que j’ai mangé plusieurs repas complets et petits-déjeuners. Il pèse encore plus d’une vingtaine de kilos, puisque le reste du matériel est toujours sur mon dos. Malgré cela, une fois mis en route, je ne remarque plus cette charge conséquente. J’en discute avec mes camarades, et nous partageons tous ce constat : le corps s’habitue rapidement à ce genre d’exercice.

En fin de matinée, nous descendons en direction de la ville de Kirn, ou nous allons retrouver la Nahe

Les passants que nous croisons nous regardent d’un air étonné : une dizaine de personnages, portants des sacs gigantesques avec des pagaies et des bateaux colorés fixés dessus déambulant en pleine ville, offrent un spectacle surprenant.

Nous arrivons au bord de la Nahe, à la confluence entre celle-ci et le Hahnenbach. Nous faisons notre dernière transition de la terre à la rivière, et profitons à nouveau de celle-ci pour prendre notre repas de midi.

Goupe kayaiste qui se changent
Métamorphose : du randonneur au pagayeur

J’hérite, pour le dernier tronçon de navigation, des pagaies de secours. Sebastian a réparti entre les membres du groupe, en changeant à chaque tronçon de porteur, quelques objets communs : une tarp ultralégère pour nous abriter, une paire de pagaie en cas de perte ou de bris de pagaie chez un participants…

Dernière mise à l’eau

Nous mettons à l’eau en début d’après-midi.

La Nahe est 3 à 4 fois plus large que le premier cours d’eau que nous avons emprunté en début d’expédition. 

Kayak rivière

La dynamique d’une telle rivière est totalement différente : pas d’obstructions, un courant plus marqué, pas besoin de pagayer constamment pour avancer. Par endroit, le flux est linéaire et régulier, et à d’autre quelques légères inflexions de pente forment des petits rapides de Classe I ou II. 

Il reste quand même quelques dangers à la navigation : il y a des rochers affleurants dans certains passages, et nous devons nous méfier des branches des arbres abattus par le vent ou l’âge, tombés depuis les berges.

Sous un grand soleil, nous franchissons ces passages avec plaisir et confiance. Les participants les plus avancés jouent avec les contre courants formés derrière les plus gros rochers, et nous trouvons même quelques petites vagues à surfer avec nos packrafts.

Groupe kayak rivière

La vallée formée par la Nahe est par endroit assez étroite, et nous passons au pied des falaises.

Nous profitons d’un passage un peu plus technique, que nous franchirons les uns après les autres, pour faire une pause collation sur la berge en gravier. 

Guide kayak

Après près de 3h de navigation, nous retrouvons le tout petit rapide sur lequel nous nous sommes entraînés le premier après-midi au camping. Après avoir franchi le seuil qui met en eau l’ancien canal alimentant le Nahemühle, nous repassons (cette fois sans encombre) le dernier passage technique avant d’accoster au pied du camping. Personne ne perd sa gourde, et personne ne tombe à l’eau cette fois-ci !

Rangement, nettoyage et débriefing

Nous voici donc revenus à la base. Mais l’expédition n’est pas terminée. Il reste une partie un peu rébarbative, mais qui est nécessaire dans toute sortie : le nettoyage du matériel.

La plupart des participants ayant des packrafts en location, ils se doivent de rendre ceux-ci dans un état impeccable à LWA. Je me joins à eux pour ce nettoyage, et suis les instructions de Sebastian. Mon packraft n’aura jamais été aussi propre ! 

Sachant que j’ai encore une nuit à l’hôtel et une demi-journée de trajet avant d’arriver chez moi le lendemain, je tente de déjà faire sécher un maximum toutes mes affaires humides, en les laissant au soleil pendant que je nettoie mon embarcation.

Je remonte une dernière fois mon paquetage en mode randonnée (j’ai 500m de marche entre la gare de Mainz et mon hôtel).

Une fois les bagages de chacun préparés, Sebastian et Jochen nous convie une dernière fois autour de la grande table en bois au centre du camp.

Nous partageons nos impressions et nos souvenirs de cette expédition et des moments partagés. 

Sebastian nous apprends qu’il avait franchement peu d’espoir pour nous suite au premier après-midi de navigation, où il nous a jugé collectivement peu performants.

Il a pu réviser son opinion au fil des heures passées sur les chemins, et la première navigue l’a rassuré. 

Les températures anormalement basses pour la saison, et la neige lors de notre nuit au Schmidtburg l’ont également fait douter. C’est la première fois lors d’une Hunsrück Adventure qu’une telle météo se présente, et il s’est sérieusement demandé s’il ne devait pas tout annuler et commander un bus pour nous évacuer. En tant que guide, il s’est questionné s’il pouvait raisonnablement faire subir ces conditions à ses clients. Il a reporté sa décision jusqu’au matin, et lorsque, sortant de sa tente, il nous a tous vu motivés et souriants en train de nous activer pour notre petit-déjeuner sous la neige, il a opté pour continuer !

Sabine, qui en est à sa quatrième Hunsrück Adventure, nous fait part de son opinion : elle n’a jamais vu une telle entente et une telle solidarité entre les participants. Lors de certaines éditions précédentes, chacun était dans sa bulle et dans son coin, sans aucunes interactions ou entraide. Etions nous une équipe exceptionnelle ? Les conditions météos ont-elles eu une influence ? Faut-il y voir un effet du COVID (les conditions sanitaires commençaient à s’améliorer, et nous avons pu dans le cadre de cette expédition, ressentir un semblant de normalité pendant quelques jours…) ?

Pour ma part, je partage mon enthousiasme et mon contentement d’avoir pu prendre part à cette aventure. Elle a tout à fait répondu à mes attentes. Malgré le gros coup de blues du début, je me suis, au final, éclaté, et ai énormément apprécié le challenge physique et l’ambiance du groupe. J’ai su trouver en moi les ressources nécessaires pour passer outre les conditions météorologiques désagréables, notamment les températures nocturnes.

Le point le plus important que je retiens, en observant les autres participants qui sont pour la plupart beaucoup plus âgés que moi (Wilbur a 67 ans !), est le suivant : je regrette de ne pas m’être intéressé beaucoup plus tôt dans ma vie au packraft, à la randonnée et au bivouac, mais je sors rassuré de cette expédition en faisant le constat que j’ai encore de longues années pour profiter comme eux de ce genre d’aventures !

Retour à la maison

Pour le retour à Mainz, Hilmar se propose de me déposer sur sa route. Nous profitons du trajet pour échanger encore un moment sur la randonnée, le camping et le packraft. Il a lui aussi déjà pris part plusieurs fois à la Hunsrück Adventure, ainsi qu’à une des expéditions que LWA organise en Scandinavie (sur une semaine). Son récit me fait vraiment envie de m’inscrire à celles-ci lors d’une prochaine édition !

Il m’explique qu’il n’avait pratiquement jamais pratiqué de sports d’extérieurs jusqu’à il y a 5 ans, et est « tombé » dans le packraft un peu par hasard, après avoir proposé sur un coup de tête à sa fille adolescente d’aller camper une nuit dans les bois. De fil en aiguille, en se renseignant et en s’équipant pour cette petite sortie, il a ouvert la porte sur ce monde riche et intéressant, et a fini par attraper le virus.

Hilmar me dépose juste devant mon hôtel, et m’offre une bouteille de bière pour mon repas du soir (apparemment les Allemands se promènent toujours avec des bouteilles de bière dans leur coffre !).

Une fois installé dans ma chambre d’hôtel, je redéplie toutes mes affaires, et suspends mes habits mouillés sur le mobilier de la chambre et de la salle de bain. 

J’allume mon réchaud à gaz dans les toilettes pour me faire chauffer de l’eau (j’ai peur de déclencher l’alarme incendie, vue que ma popotte est encrassée de suie de feu de bois !), pour me préparer un bibimbap lyophilisé, que je fais descendre avec la bière d’Hilmar. Un délice !

Bière et nourriture déshydratée
Prost !

Me voilà prêt pour la nuit ! Je m’endors rapidement.

Ne me restera plus, le lendemain, qu’un long et tranquille trajet en train jusqu’à mon domicile en Suisse !

Je conclus ainsi mon récit d’expédition. J’espère qu’il vous a intéressé, et que j’ai pu vous faire partager les émotions et les sensations que j’ai ressenties, parfois des doutes, bien souvent du plaisir.

Ce micro-format, sur quatre jours et relativement proche de la civilisation, est un excellent condensé de ce qu’il est possible de faire avec un packraft, un sac à dos et un peu d’endurance. 

Je vous encourage à vous y intéresser, sous ce format ou sous un autre, à pied, en packraft ou à vélo !

 

Allez dehors, et essayez !

 

Sylvestre Grünwald

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *