Comment trouver du bois sec, même dans une forêt humide ?

Chère Lectrice, cher Lecteur,

Dans cette chronique bushcraft, je vous parle très souvent du feu.

Aujourd’hui je reviens aux bases, et vous donne quelques conseils pour trouver du bois sec, afin de faire prendre facilement votre feu et l’alimenter sans trop de fumée et avec efficacité, et ce même en conditions humides.

Il y a quelques trucs assez simples, et des techniques à connaître.

Pour commencer : le petit bois

C’est souvent l’élément le plus délicat…à moins d’avoir un gros allume-feu chimique avec vous, ou beaucoup de résine, il vous sera pratiquement impossible de démarrer un feu sans petit bois bien sec. 

Vous avez deux solutions, trouver des branches fines de sapin ou travailler sur du bois plus gros pour accéder au bois sec au milieu.

Le but, dans tous les cas, est d’avoir un maximum de surface sèche au contact de la flamme dégagée par votre allume-feu, et de pouvoir dégager rapidement une chaleur vive, qui permet d’enflammer votre bois de taille supérieure.

Les branches fines

Si vous êtes dans une forêt de résineux, c’est toujours la solution la plus simple. La forme des sapins ou des épicéas est ainsi faite que leur pied reste toujours pratiquement sec (la canopée fait parapluie). De plus, les branches supérieures « étouffent » progressivement les branches inférieures en leur coupant la lumière. 

Branches basses sèches au pied d’un résineux

On trouve donc généralement sur la partie inférieure du tronc des branches mortes, dont l’extrémité ramifiée est fine et cassante. Une grosse poignée de brindilles d’environ 30 à 40 cm de long permet normalement d’allumer un feu. On les pliera en deux en les cassant, pour y nicher l’allume-feu (naturel :fatwood, écorce de bouleau, résine…ou artificiel : hydrocarbure, cire…).

Sur les résineux comme les pins, l’effet parapluie est moins efficace, mais on trouvera quand même assez facilement des rameaux avec des aiguilles au pied de l’arbre, ou des branches cassées pendantes. La résine qui imbibe les aiguilles vous aidera à obtenir rapidement beaucoup de chaleur pour démarrer votre feu.

Touffe d’aiguilles de pin sèches
Branche de pin sèche, avec ses aiguilles. Elle est resté suspendue dans un buisson, et n’est donc pas exposée à l’humidité au sol

Le bois du cœur et du duramen

Une autre option pour accéder à du petit bois bien sec c’est, paradoxalement, de trouver du « gros » bois.

Un arbre mort va généralement sécher sur pied, avant d’être abattu par le vent. Sauf s’il a subi une grave attaque de champignon quand il était encore sur pied, le centre de son tronc (on parle du duramen et du cœur) restera sec pendant quelques temps, l’humidité ambiante (pluie, humidité au sol…) l’attaquant depuis l’extérieur (écorce, puis liber, cambium et aubier).

Structure du bois – source afd.be

Le but est d’accéder au bois sec au cœur du tronc (ou des plus grosses branches), précisément au duramen, en rejetant les parties extérieures les plus humides.

Pour ce faire, une hachette ou un gros couteau seront nécessaires. Je vous ai présenté dans une autre lettre la technique du batonnage, et une méthode sûre pour utiliser une hachette. Elles vous seront très utiles pour débiter le bois en bûchettes de plus en plus fines.

Une fois une taille suffisamment petite atteinte, vous pourrez travailler les bûchettes pour les transformer en « bâton de plume » (featherstick) ou en « frisettes ». 

J’avoue : je suis très mauvais pour faire des bâtons de plume ! Je me rate souvent en appuyant trop fort, et je détache alors la grappe de fines boucles que j’ai « rasé » sur le morceau de bois. Donc je me retrouver avec un tas de fines boucles (ce que j’appelle des « frisettes »).

Une alternative : La végétation sèche

Il est possible de trouver dans certaines conditions de la végétation sèche autre que du bois, qui prendra facilement la flamme de votre allume-feu, et dégagera suffisamment de chaleur (et certainement beaucoup de fumée) pour enflammer le bois de taille intermédiaire. 

On pourra par exemple recourir à de l’herbe sèche, ou comme sur la photo ci-dessous à de la fougère séchée. 

Cette grande fougère a poussé entre le branche de ce feuillu, et y est resté accrochée en fin de saison, elle est donc parfaitement sèche et n’a jamais été au contact de l’humidité du sol.

Si vous devez avoir recours à cette option, mon conseil : récoltez-en VRAIMENT beaucoup avant de démarrer votre feu

La règle d’or : préserver votre petit bois de l’humidité

Quelle que soit la manière dont vous vous serez procuré votre petit bois, vous devrez, au même titre que votre amadou (herbe sèche, écorce de bouleau…), le protéger au maximum de l’humidité. Récolter un beau tas de brindilles, et le laisser traîner 10 minutes sous la pluie pendant que vous préparez le reste du matériel pour faire votre feu n’a aucun sens. 

De même, laisser un tas de frisettes ou votre beau featherstick par terre au contact d’un sol humide est contre productif.

Gardez ce petit bois à l’abri, sur une surface sèche. Vous le couvrirez avec un morceau d’écorce, le mettrez sous une pierre, ou éventuellement dans votre poche ou dans votre sac à dos.

Ensuite : le bois intermédiaire et le gros bois

Après le petit bois très fin, il vous faudra des branchettes pas plus grosses que votre petit doigt, puis progressivement des morceaux de la taille de votre pouce et enfin des bûches de quelques centimètres de côté ou de diamètre.

Pour les branchettes, un bois très sec reste primordial.

Pour le bois de la taille du pouce, et au-delà, vous pouvez commencer à tolérer un peu d’humidité dans et sur le bois, mais vous gagnerez toujours néanmoins à exposer à exposer la partie la plus sèche du bois à la flamme !

Les branchettes de la taille du petit doigt

Là aussi, si vous êtes dans une forêt de résineux, vous trouverez facilement à la base du tronc des branchettes de 0.5 à 1 cm de diamètre maximum (vous les aurez probablement déjà récoltées en rassemblant le petit bois).

Branches basses sèches au pied d’un résineux, taille disponible de la brindille jusqu’au diamètre du pouce !

Sinon, vous devrez à nouveau utiliser votre hachette ou le bâtonnage pour débiter ces branchettes dans une branche plus grosse. Vous garderez évidemment le duramen le plus sec, et non la partie extérieure plus proche de l’écorce !

Les morceaux de la taille du pouce

Pour ces morceaux, vous pouvez commencer à conserver toute l’épaisseur du bois (y.c écorce et aubier) si celui-ci n’est pas complètement détrempé. Si vous arrivez à tailler des morceaux en forme de coin, la partie fine du coin sera bien sèche (issue du duramen), et prendra feu facilement. La chaleur dégagée permettra de faire sécher progressivement la partie extérieure plus épaisse et plus humide.

Si vous n’avez pas pu procéder au débitage de morceaux dans une grosse branche, et que vous êtes limités à des branches ramassées, il faudra peut-être augmenter la quantité de branchettes dans votre démarrage de feu, pour permettre aux morceaux plus gros de prendre correctement.

Et au-delà…

Au-dessus de la taille du pouce, avec des morceaux de 2 à 4 cm de côté, vous aurez toujours intérêt à exposer un côté sec à la flamme, afin qu’il prenne facilement. 

Si votre gros bois n’est pas bien sec, vous pourrez immédiatement le disposer en empilage autour de votre foyer, afin que la chaleur dégagée fasse sécher au plus vite le bois. Double avantage, cette petite palissade de bûches agit comme un réflecteur !

Un dernier conseil…

Une erreur que j’ai souvent faite, et que je fais encore parfois quand je ne suis pas très concentré, c’est de négliger la quantité de petit bois et de branchettes pour démarrer mon feu. 

Généralement, je n’ai aucun souci pour faire prendre mon allume-feu (la combinaison fatwood-écorce-résine est imparable), mais les étapes critiques sont les deux suivantes.

Même si vous avez un gros tas de brindille de sapin très sèches, vous ne ferez pas prendre du bois plus gros que votre pouce (sauf s’il est VRAIMENT très sec !), et de même, votre allume-feu ne suffira généralement pas à faire prendre les branchettes de la taille du petit doigt (sauf si c’est un gros allume-feu chimique !).

Mon conseil, donc : respecter l’ordre et la taille du bois que vous utilisez, et prenez le temps (c’est parfois juste une ou deux minutes de plus) pour récolter ou préparer du petit bois en abondance ! 

Combinaison idéale : des branches sèches au sol, et un tronc balafré couvert de résine. Avec ça, ça devient un bonheur de faire un feu !

Imaginez que vous n’avez qu’une seule allumette, et préparez toujours votre bois avec cette idée en tête.

Avec ces quelques éléments très simples à mettre en place, vous devriez gagner en aisance pour allumer un feu dans des conditions adverses : Trouver ou préparer du très petit bois, respecter la taille et l’ordre dans lequel vous l’utilisez, faire sécher progressivement le bois plus gros.

Mais pour le feu, plus que pour tout autre chose dans le monde du bushcraft ou de la survie, la pratique est essentielle, donc :

 

Allez dehors et essayez !

Sylvestre Grünwald

Signature de Sylvestre

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